Presse

Deux concerts d’exception consacrent la 27e édition de présences

Incandescence avec Court-Circuit

 

Le dernier concert bénéficie de l’espace luxueux et du confort acoustique de l’Auditorium de la Maison Ronde. Kaija Saariaho vient une dernière fois sur scène répondre aux questions d’Arnaud Merlin avant que ne résonne, sous les trois archets des solistes de Court-Circuit, le Cloud Trio de la compositrice. C’est le ciel des Arcs, dans les Alpes du Nord où elle était en résidence en 2009, qui lui inspire cette nouvelle œuvre dont la fragilité des textures et l’aspect ductile de la matière sont subtilement rendus par les interprètes. Affleurent même quelques bouffées de lyrisme à travers les lignes expressives du violoncelle – – et du violon –  – infiltrant des couleurs chaudes et un certain sensualisme dans un contexte plutôt contemplatif.
Reverse tracking shot du jeune Chilien , conçu en cinq séquences pour le format des Alla breve, est donnée en création mondiale. C’est une pièce à haute tension et puissamment expressive dont le matériau extrêmement ciselé et les couleurs vives de l’ensemble interpellent. Le geste investi de  et le relief donné par les interprètes de Court-Circuit ne laissent d’impressionner. Électrisante également est la musique du regretté  dont l’énergie et le rythme transcendent la matière sonore. DansQuatre pantomimes pour six, il met à l’œuvre une dimension théâtrale du geste musical servant ces pantomimes de sons. Jubilation des couleurs et nervures rythmiques galvanisent l’écoute et perpétuent une certaine tradition de la fête sud-américaine dont on perçoit ici les échos.

Donnée également en création mondiale, Die finsteren Gewässer der Zeit (Les Eaux sombres du temps) de  est la suite instrumentale de son ouvrage scénique Austerlitz dont on pénètre ici, dans un temps suspendu et énigmatique, toutes les subtilités et le raffinement de l’écriture.Très sollicité sur le clavier comme dans les cordes du piano,  a également en charge le tam-tam, frotté, raclé autant que percuté qui, dans cette acoustique généreuse, modifie radicalement l’espace. Souffles, effleurements, itérations habitent un univers étrange autant qu’attachant où la matière plus pleine et charnue du trombone – rare dans l’instrumentarium du compositeur – conduit la dramaturgie à la faveur d’interventions saisissantes. L’œuvre s’étire presque dangereusement sur une durée de 28′, mais comme chez Schubert, les longueurs de Combier peuvent être délectables…

Dernière œuvre au programme, Talea (1985) de  est tellement visionnaire qu’elle semble à chaque nouvelle exécution révéler des détails encore insoupçonnés. Superbe, le début abrupt, sous le geste radical de  – qui donne une interprétation habitée de ce chef d’œuvre – laisse apprécier les partiels du son que détaillent avec finesse les instrumentistes. Somptueuses sous les doigts de , les cadences du piano qui préfigurent celle de Vortex temporum. Énormes enfin, les sons multiphoniques obtenus par la clarinette de Pierre Dutrieux. Flûte, violon et violoncelle ne déméritent pas dans une œuvre qui réclame tout à la fois énergie du geste et ferveur du son, tel ce trait diabolique du violon qui referme l’œuvre sous l’archet survolté d’.

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